La tente Alcatraz

Internet, les intelligences artificielles, Google : tous minables quand il s’agit d’obtenir des conseils en rapport avec les enfants – pardon les kids (bien sûr). 

Quand Jean-Tibia était âgé de quelques mois, j’ai tapé : « Empêcher la tétine de tomber » sur mon meilleur moteur de recherche. J’ai dû endurer des kilomètres d’astuces 100% à côté de la plaque. « Mettez plusieurs tétines dans le lit, lolilol ! ». Jean-Tibia ne savait pas se servir de ses mains. S’il fallait mettre 200 tétines sur le matelas dans l’espoir que sa bouche tombe dessus par hasard, on n’allait pas s’en sortir.

Il m’a fallu beaucoup de patience avant de tomber sur la proposition d’un illustre anonyme, sur un Skyblog de derrière les fagots numériques :  



Un bâillon SM. Je n’étais pas prête à sauter le pas, mais je salue la créativité et l’audace. Et j’ai aimé imaginer la scène qui a précédé la trouvaille :
« – Passe-moi le bonnet, le moche avec des fleurs.
– Pourquoi ?
– Tu te souviens de Marsellus Wallace dans Pulp fiction ? Donne, je te dis ».

Plus tard. Jean-Tibia sait désormais empoigner sa tétine, il a 14 mois. Son père et moi sommes à son chevet, à lui réexpliquer le principe de la nuit et les bénéfices du sommeil. L’enfant, tout en ne nous écoutant pas, retire sa gigoteuse d’un coup d’épaule, comme un sportif qui se débarrasse de son peignoir.

Et soudain, le voilà qui projette ses deux jambes sur le côté, sans hésitation aucune, de sorte qu’elles passent par-dessus le bord ; l’enfant s’est littéralement projeté hors de son lit.

On hurle, le Grand et moi, mais que nenni, Jean-Tibia atterrit les deux pieds au sol, c’est limite s’il ne lève pas les deux bras pour saluer le jury. 


Une fois qu’il a compris qu’il maitrisait le cheval d’arçons comme personne, Jean-Tibia s’est mis à sortir de son lit de manière compulsive. Parfois 16 fois de suite (j’ai compté) et souvent entre 3 et 6 heures du matin. 

Je n’en pouvais plus, camarade influencée.

Alors rebelote, j’ai tapé : « Empêcher enfant de sortir de son lit ». Et rebelote, conseil à la con. « Si bébé sort de son lit, c’est qu’il a assez dormi, soyez à l’écoute de son rythme, lolilol ».

On s’est mal compris, Google. Je ne te demande pas pourquoi il sort, je te demande comment l’en empêcher. J’ai tendu une serviette de bain au-dessus de son lit, ça ne l’a pas arrêté, il s’en est servi comme d’un trampoline. Je suis à deux doigts de clouer une planche donc joue pas au con avec moi.



J’ai navigué, navigué. Et soudain :


Une moustiquaire ! Ou comment entraver efficacement la liberté de mouvement de son bébé tout en passant pour une bonne mère qui le préserve du chikungunya et de la dengue (2271 cas en métropole en 2024). Du génie. J’ai immédiatement passé commande. Sur Amazon, absolument.

Six mois ont passé camarade influencée, et Jean-Tibia dort paisiblement. Le Grand et moi trimballons notre moustiquaire partout – nous la surnommons affectueusement « Alcatraz ». Lolilol.

Mieux encore : un soir où nous avions la flemme de la monter, nous nous sommes aperçus que Jean-Tibia est déconditionné de son habitude. Même sans Alcatraz, il ne tente plus de sortir.

Nous avons réussi à le détourner pour toujours de sa carrière de gymnaste. C’est aussi ça, éduquer un enfant.

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